Nous montrons aux filles un monde rempli de possibles.

Les stéréotypes ont la vie dure – les clichés culturels aussi

La semaine dernière, K-Tipp, le magazine suisse alémanique des consommatrices et des consommateurs, a publié un entrefilet sur KALEIO qui nous a sidérées. Les sous-entendus glissés entre les lignes de ce petit article viennent jeter de l’huile sur le feu des stéréotypes culturels, ce qui est tout simplement consternant.

Un magazine pour filles suisse – made in Pologne Le projet a tout pour plaire : un nouveau magazine pour les filles d’aujourd’hui, « sans conseil maquillage ni stéréotype de genre ». Pour que « Kaleio », c’est son nom, puisse prendre son envol et « donner une voix aux préadolescentes de Suisse », 1700 personnes ont versé près de 131 000 francs sur la plateforme de financement participatif Wemakeit.com. Le Pour-cent culturel Migros et la banque cantonale de Bâle-Campagne ont également soutenu le projet. Une lectrice de K-Tipp a participé à hauteur de 100 francs. En lisant le premier numéro, elle a remarqué les nombreux noms d’auteurs d’origine polonaise. Interrogée par K-Tipp, la rédaction de Kaleio confirme que près de la moitié des textes sont écrits par un magazine polonais et traduit pour « Kaleio ». Pas un mot de cela sur Wemakeit.com. On y lit seulement que le magazine est « publié en Suisse » et qu’il est « imprimé en Suisse ». Un numéro coûte la coquette somme de 19 francs. (gu)
Cet entrefilet a paru dans l’édition 11/2021 de K-Tipp

« Made in Pologne »

« Made in Pologne » – sérieusement K-Tipp ? Êtes-vous en train d’insinuer que nous diffusons des produits bon marché de l’Est ? Que seul est juste et bon ce qui vient de Suisse ? Il y a là un relent d’impérialisme culturel qui devrait rester relégué dans les poubelles de l’Histoire.

La coopération internationale est une pratique courante dans le monde de l’édition. Jamais nous n’avons dissimulé notre collaboration avec le magazine polonais « Kosmos dla dziewczynek ». Au contraire, nous en parlons clairement dans notre rubrique FAQ et nous nous en sommes souvent félicitées sur notre blog (ici et ici). Du reste, toutes les fondations et institutions qui nous soutiennent sont parfaitement informées de cette collaboration.

Dans les interviews que nous donnons à la presse, nous mentionnons systématiquement les racines polonaises du magazine (par ex. sur RTS Forum, dans Le Temps et sur Loose Antenna). En fait, la plupart des contributeurices ont découvert notre financement participatif via l’un de ces médias et beaucoup ont considéré cette origine polonaise comme un atout, car iels savent qu’en Pologne le mouvement féministe est très actif.

Mais le plus important est que nous donnons une voix aux filles de Suisse. Nous allons à leur rencontre pour les interviewer, leur demandons leur avis, publions leurs lettres de lectrices, présentons leurs livres préférés. Nous leur donnons la parole dans autant de rubriques que possible. Et dans chaque numéro nous écrivons un article pour et sur la Suisse. Les textes du magazine polonais que nous reprenons et traduisons présentent des sujets universels : expériences, bricolages, animaux et environnement, psychologie, le tout agrémenté de magnifiques illustrations.

De tout cela K-Tipp n’en fait sciemment aucune mention, mais sert le cliché d’obscures manigances venant de Pologne. Quant au fait que plusieurs des « auteurs au nom d’origine polonaise » (à ce propos il s’agit d’autrices) habitent depuis leur naissance en Suisse, K-Tipp n’en tient absolument pas compte. Ainsi donc, nous nous interrogeons : devrions-nous nous sentir « coupables » ? Mais de quoi ? D’avoir toujours communiqué en toute transparence ? D’avoir établi une collaboration transculturelle qui a permis à la Suisse d’ajouter un magazine aux multiples facettes à son offre rédactionnelle ? De poursuivre une coopération qui soutient les forces vives au service du progrès en Pologne ?

Certainement pas : le travail de la rédaction polonaise est fantastique et nous sommes ravies de pouvoir reprendre librement leurs meilleurs articles. Ceux-ci nous servent de base pour créer, avec des moyens très réduits, un magazine bimestriel inspirant et stimulant pour les filles de Suisse.

K-Tipp nous a cependant révélé une chose : si les stéréotypes de genre ont la vie dure, il en va de même des clichés culturels. Et nous les combattons autant l’un que l’autre. Avec KALEIO, nous voulons promouvoir l’échange d’idées entre les filles et les femmes, tant en Suisse romande et alémanique qu’au-delà de nos frontières. Regardons plus loin que le bout de notre nez : une collaboration transnationale pour plus d’égalité des genres et de diversité des points de vue devrait être saluée et non pas critiquée.


Traduction : Corinne Verdan-Moser

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